Les infections sexuellement transmissibles comme maladies professionnelles : un débat crucial pour les travailleuses du sexe

Les infections sexuellement transmissibles (IST) constituent un risque professionnel majeur pour les travailleuses et travailleurs du sexe en Belgique, une population particulièrement vulnérable en raison de la nature de leur activité. Pourtant, leur reconnaissance comme maladies professionnelles reste un sujet complexe, peu abordé et controversé. Accorder ce statut aux IST transformerait la prise en charge sanitaire et sociale des travailleuses du sexe, tout en renforçant leurs droits. Cet article explore pourquoi la reconnaissance des IST comme maladies professionnelles est un enjeu crucial en Belgique, les obstacles structurels, juridiques et sociétaux à sa mise en œuvre, et les solutions envisageables pour garantir une meilleure protection de ces travailleuses.
Pourquoi les IST comme maladies professionnelles sont un enjeu crucial
1. Un risque professionnel inhérent à l’activité
Les travailleuses du sexe, par la nature de leur métier, sont exposées à un risque élevé de contracter des IST telles que la chlamydiose, la gonorrhée, la syphilis, l’hépatite B, l’herpès génital ou le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus d’un million de nouveaux cas d’IST sont enregistrés quotidiennement dans le monde, et les travailleuses du sexe sont particulièrement vulnérables en raison de la fréquence des contacts physiques à risque dans leur environnement professionnel. En Belgique, où la prostitution est tolérée dans certaines zones, notamment à Anvers ou Bruxelles, ce risque est amplifié par des conditions de travail souvent précaires. Pour en savoir plus sur les pratiques de prévention, consultez notre article sur les pratiques de prévention des IST chez les escorts en Belgique. Reconnaître les IST comme maladies professionnelles permettrait d’identifier officiellement ces infections comme des conséquences directes de leur activité professionnelle. Cela ouvrirait la voie à une prise en charge médicale systématique, à des indemnisations financières adaptées et à une protection sociale renforcée pour les travailleuses du sexe, souvent confrontées à une précarité économique et sanitaire. Cette mesure légitimerait également leur activité comme un travail à part entière, avec des droits comparables à ceux d’autres professions exposées à des risques spécifiques, comme les troubles musculo-squelettiques pour les ouvriers ou les maladies respiratoires pour les travailleurs exposés à des substances dangereuses.
2. Une avancée pour la protection sociale et les droits des travailleuses
En Belgique, une maladie professionnelle est définée par la législation comme une affection liée à l’exercice d’une activité professionnelle, selon le Fonds des maladies professionnelles (FMP), intégré depuis 2016 à l’Agence fédérale des risques professionnels (Fedris). Lorsqu’une maladie est reconnue comme professionnelle, elle donne droit à une prise en charge des frais médicaux, à des indemnités en cas d’incapacité temporaire ou permanente, et, dans certains cas, à une rente. Pour les travailleuses du sexe, cette reconnaissance serait une avancée majeure, car beaucoup opèrent en tant qu’indépendantes ou dans des cadres informels, les excluant des protections sociales réservées aux salariés ou aux indépendants affiliés à un régime spécifique. Une telle mesure garantirait un accès équitable à des soins médicaux de qualité, sans frais à leur charge, et une sécurité financière en cas de maladie. En Belgique, où le système de santé est réputé pour sa qualité mais où l’accès peut être limité pour les populations marginalisées, cette reconnaissance réduirait les inégalités auxquelles les travailleuses du sexe sont confrontées, tout en renforçant leur dignité et leur inclusion sociale.
3. Un levier pour déstigmatiser le travail du sexe
La stigmatisation des travailleuses du sexe reste un obstacle majeur à leur accès aux droits fondamentaux en Belgique. Reconnaître les IST comme maladies professionnelles permettrait de déconstruire les préjugés entourant ce métier en mettant en lumière les risques professionnels auxquels elles sont exposées, au même titre que d’autres professions à risque, comme les soignants confrontés aux infections nosocomiales ou les ouvriers exposés à l’amiante. Cette mesure légitimerait le travail du sexe comme une profession méritant les mêmes protections que d’autres secteurs d’activité. Pour approfondir l’impact de la stigmatisation, lisez notre article sur comment la stigmatisation affecte le bien-être émotionnel des escorts en Belgique. En Belgique, où le travail du sexe est partiellement régulé dans certaines villes comme Anvers, cette reconnaissance pourrait encourager un débat sociétal plus large sur la dépénalisation complète et la régularisation du travail du sexe, à l’image de pays comme les Pays-Bas. Elle aurait également un impact positif sur la santé publique en facilitant l’accès aux dépistages réguliers, aux traitements et aux moyens de prévention, réduisant ainsi la prévalence des IST dans la population générale. Pour explorer les initiatives en matière de santé publique, découvrez notre article sur les partenariats public-privé dans la lutte contre les IST en Belgique.
Les obstacles majeurs à la reconnaissance des IST comme maladies professionnelles
1. L’absence des IST dans la liste des maladies professionnelles
En Belgique, la reconnaissance des maladies professionnelles repose sur deux systèmes : la liste fermée des maladies professionnelles établie par Fedris, qui inclut des pathologies comme les troubles musculo-squelettiques ou les maladies liées à l’amiante, et le système ouvert, permettant de reconnaître une maladie non listée si un lien direct avec l’activité professionnelle est prouvé. Les IST ne figurent pas sur cette liste, ce qui constitue un obstacle majeur à leur reconnaissance automatique. Dans le système ouvert, les travailleuses du sexe doivent démontrer que l’infection a été contractée dans le cadre de leur activité professionnelle, une démarche complexe nécessitant des preuves médicales et administratives souvent difficiles à obtenir. Ce processus, géré par Fedris, est long et incertain, particulièrement pour une profession marginalisée comme le travail du sexe. Prouver que l’IST est liée exclusivement au travail, et non à la sphère privée, pose des défis éthiques et pratiques, notamment en matière de confidentialité et de collecte de données personnelles.
2. Le statut juridique ambigu du travail du sexe
En Belgique, la prostitution n’est pas illégale depuis la dépénalisation partielle entrée en vigueur en 2022, mais elle reste mal encadrée. Les travailleuses du sexe opèrent souvent en tant qu’indépendantes ou dans des cadres informels, notamment dans les zones de tolérance comme les quartiers rouges d’Anvers ou de Bruxelles. Ce statut juridique flou les prive des protections sociales accordées aux salariés ou aux indépendants affiliés à un régime spécifique, comme celui de l’Institut national d’assurance maladie-invalidité (IN privilège). Sans reconnaissance claire de leur profession, intégrer les IST dans le cadre des maladies professionnelles reste un défi majeur.
3. La stigmatisation et le manque de données épidémiologiques
La stigmatisation du travail du sexe entrave la reconnaissance des IST comme maladies professionnelles. Les préjugés sociétaux et la méconnaissance des réalités de ce métier relèguent les travailleuses du sexe dans une invisibilité sociale et administrative. Cette marginalisation limite la collecte de données épidémiologiques fiables sur la prévalence des IST dans cette population, essentielle pour justifier leur inclusion dans la liste des maladies professionnelles. Contrairement aux pathologies comme les troubles musculo-squelettiques, qui représentent une part importante des cas reconnus par Fedris, les IST souffrent d’un manque de visibilité dans le cadre professionnel. Pour mieux comprendre ces enjeux, consultez notre article sur comment la stigmatisation affecte le bien-être émotionnel des escorts en Belgique. La clandestinité ou la semi-clandestinité dans laquelle opèrent certaines travailleuses du sexe, notamment les migrantes ou celles exerçant en dehors des cadres régulés, complique encore davantage l’établissement de statistiques fiables. Sans ces données, convaincre les autorités sanitaires et politiques de la nécessité de reconnaître les IST comme maladies professionnelles reste ardu.
4. La complexité de la preuve du lien causal
Dans le système ouvert de Fedris, une maladie peut être reconnue comme professionnelle si un lien direct avec l’activité professionnelle est démontré. Cependant, prouver qu’une IST a été contractée dans le cadre du travail du sexe est extrêmement complexe, car ces infections peuvent également être contractées dans la sphère privée. Cette ambiguïté complique l’évaluation par Fedris, qui exige des preuves médicales et contextuelles solides. Pour les travailleuses du sexe, cette exigence représente un obstacle supplémentaire, d’autant plus qu’elles peuvent hésiter à divulguer des informations personnelles en raison de la stigmatisation et du risque de discrimination.
Vers une reconnaissance : quelles solutions pour avancer ?
1. Mise à jour de la liste des maladies professionnelles
Pour surmonter l’obstacle de la liste fermée, une révision des maladies professionnelles reconnues par Fedris pourrait inclure les IST pour les travailleuses du sexe. Cela nécessiterait des études épidémiologiques menées par des institutions comme Sciensano pour documenter la prévalence des IST dans cette population et établir un lien clair avec leur activité professionnelle. Une concertation avec des associations comme UTSOPI (Union des travailleuses et travailleurs du sexe organisés pour l’indépendance) serait essentielle pour définir les critères d’exposition.
2. Régularisation complète du travail du sexe
La dépénalisation partielle du travail du sexe en Belgique, effective depuis 2022, marque un premier pas, mais une régularisation complète, comme celle des Pays-Bas, permettrait d’intégrer pleinement les travailleuses du sexe dans le système de protection sociale. En leur accordant un statut juridique clair, qu’il s’agisse de salariées ou d’indépendantes affiliées à l’INAMI, elles pourraient bénéficier de l’assurance maladies professionnelles. Cette régularisation réduirait également la stigmatisation et faciliterait l’accès aux soins.
3. Renforcement des mesures de prévention
La prévention des IST doit être une priorité pour protéger les travailleuses du sexe. Cela passe par un accès facilité aux dépistages réguliers, aux vaccins (comme ceux contre le HPV ou l’hépatite B) et à des moyens de protection comme les préservatifs. Des organisations comme Violett à Anvers ou Espace P à Bruxelles offrent déjà des services de santé, mais ces initiatives doivent être renforcées par des financements publics et des campagnes de sensibilisation ciblées. Pour approfondir ce sujet, consultez notre article sur les pratiques de prévention des IST chez les escorts en Belgique. Des formations sur la santé sexuelle et les risques professionnels pourraient également être proposées pour renforcer l’autonomie des travailleuses.
4. Plaidoyer associatif et mobilisation collective
Les associations comme UTSOPI jouent un rôle clé dans ce débat. Elles peuvent porter la voix des travailleuses du sexe auprès des autorités, de Fedris et d’institutions comme Sciensano, en plaidant pour la reconnaissance des IST comme maladies professionnelles. Des campagnes de sensibilisation pourraient également mobiliser le public et les décideurs politiques pour soutenir des réformes législatives. Pour en savoir plus sur le rôle des partenariats, découvrez notre article sur les partenariats public-privé dans la lutte contre les IST en Belgique.
5. Sensibilisation et éducation du public
Pour combattre la stigmatisation, des campagnes d’éducation pourraient changer les perceptions du public sur le travail du sexe. En mettant en avant les réalités de cette profession et les risques auxquels les travailleuses sont exposées, ces initiatives légitimeraient leur combat pour une meilleure protection sociale. Une société mieux informée serait plus encline à soutenir des réformes en faveur des IST comme maladies professionnelles. Pour explorer les solutions à la stigmatisation, lisez notre article sur comment la stigmatisation affecte le bien-être émotionnel des escorts en Belgique.
Conclusion : un enjeu de justice sociale et de santé publique
La reconnaissance des IST comme maladies professionnelles pour les travailleuses du sexe est un enjeu majeur en Belgique, touchant à la santé publique, aux droits humains et à la justice sociale. En garantissant une meilleure protection sociale, en réduisant la stigmatisation et en améliorant l’accès aux soins, cette mesure bénéficierait non seulement aux travailleuses du sexe, mais aussi à la société dans son ensemble. Cependant, les obstacles sont nombreux : absence des IST dans la liste des maladies professionnelles, statut juridique flou, stigmatisation persistante et complexité de la preuve du lien causal. Pour avancer, une approche combinée est nécessaire : mise à jour de la liste des maladies professionnelles, régularisation complète du travail du sexe, renforcement de la prévention et mobilisation des associations. En 2025, ce débat doit être porté au-devant de la scène publique belge pour garantir une protection effective des travailleuses du sexe et reconnaître leur droit à une santé et une sécurité dignes. En agissant pour la reconnaissance des IST comme maladies professionnelles, la Belgique pourrait poser un jalon décisif vers une société plus inclusive et équitable.